[Chronique fantasy] Boudicca, de Jean-Laurent del Socorro

Boudicca ne cesse de dire que les mots ne sont pas faits pour elle, et pourtant ceux qu’elle exprime m’ont bien souvent bouleversée.

Acherontia Nyx

Synopsis

Angleterre, an I. Après la Gaule, l’Empire romain entend se rendre maître de l’île de Bretagne. Pourtant la révolte gronde parmi les Celtes, avec à leur tête Boudicca, la chef du clan icène. Qui est cette reine qui va raser Londres et faire trembler l’empire des aigles jusqu’à Rome ? À la fois amante, mère et guerrière mais avant tout femme libre au destin tragique, Boudicca est la biographie historique et onirique de celle qui incarne aujourd’hui encore la révolte.

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[Chronique fantastique] Le dieu dans l’ombre, de Megan Lindholm

Au final, à bien y réfléchir, je pense avoir eu entre les mains un authentique roman féminin qui tend à dénoncer l’enfermement de certaines femmes dans des rôles qui ne leur conviennent pas et qui leur laisse trop peu de place pour s’exprimer et se sentir libres.

Acherontia Nyx

Loin de ses forêts d’Alaska natale, Evelyn est propulsée dans le monde de Tom, son mari, avec son fils Teddy. Coincée dans la vie quotidienne de sa belle-famille, la jeune femme ne se retrouve pas dans la place de femme et d’épouse qui lui est assignée. Fuyant les tâches ménagères et le désœuvrement, elle replonge dans ses souvenirs d’enfance qui oscillent entre nature et poésie, aux côtés de son ami Pan, le faune mystique avec qui elle a grandi. Lorsque celui-ci réapparaît, des envies de liberté mêlées de rêves sensuels s’agitent en elle. Á mi-chemin entre la civilisation et la nature, sous le couvert des arbres glacés, Evelyn devra faire face à deux choix terribles. Trouvera-t-elle son chemin dans l’ombre ?

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[Chronique thriller historique] Le dernier hyver, de Fabrice Papillon

« Le dernier hyver », c’est ce que j’appelle un roman-éclaircie, un de ces récits qu’on ne commence à comprendre qu’une fois la mécanique bien mise en marche, à l’instar du soleil qui perce progressivement les nuages après la tempêtes. 

Acherontia

Synopsis…

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On dit que l’hiver vient. Peut-être le dernier pour les porteurs du chromosome Y…

Août 415 après J-C. : La ville d’Alexandrie s’assoupit dans une odeur âcre de chair brûlée. Hypatie, philosophe et mathématicienne d’exception, vient d’être massacrée dans la rue par des hommes en furie, et ses membres en lambeaux se consument dans un brasier avec l’ensemble de ses écrits.

Cet assassinat sauvage amorce un engrenage terrifiant qui, à travers les lieux et les époques, sème la mort sur son passage. Inéluctablement se relaient ceux qui, dans le sillage d’Hypatie, poursuivent son grand oeuvre et visent à accomplir son dessein.

Juillet 2018 : Marie, jeune biologiste, stagiaire à la police scientifique, se trouve confrontée à une succession de meurtres effroyables, aux côtés de Marc Brunier, homme étrange et commandant de police de la « crim » du Quai des Orfèvres. Peu à peu, l’étudiante découvre que sa propre vie entre en résonance avec ces meurtres.

Est-elle, malgré elle, un maillon de l’histoire amorcée à Alexandrie seize siècles auparavant ? Quel est ce secret transmis par Hypatie et au coeur duquel se retrouve Marie ? L’implacable destin peut-il être contrecarré ou « le dernier Hyver » mènera-t-il inéluctablement l’humanité à sa perte ?

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La loi d’attraction universelle

J’ai découvert ce roman par le biais de la plateforme Netgalley, que je tiens à remercier au passage, ainsi que les éditions Belfond (auprès de qui je m’excuse platement pour l’énorme délais de chronique).

Je sais qu’il n’est guère dans mes habitudes de faire dans le thriller historique, même si j’apprécie beaucoup le style. Mais la couverture et le résumé ont su capter mon attention, bien plus que je ne l’aurais cru possible. Ce n’est pas tellement l’enquête en elle-même qui m’a attirée, non. Car, de façon générale, les enquêtes policières trop modernes, menées à grand renfort de technologie dernier cri et d’abréviations tirées par les cheveux, ce n’est pas trop mon fort (à moins qu’elle ne soit vue du point de vue du légiste, auquel cas je sens généralement un regain d’intérêt). C’est surtout l’aspect historique qui m’a emballée, et toutes ses implications dans le présent. Parlez-moi de meurtre mystique particulièrement sanglant, de grand oeuvre, de la perte de l’humanité, et je saute sur l’occasion, inévitablement!

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Mécaniques parallèles

Le roman s’articule autour de deux axes : celui de l’Histoire, cette grande mécanique trop bien huilée dont les événements s’enchaînent tels de machiavéliques rouages, et celui du Présent, incarné par le récit de Marie, jeune biologiste stagiaire à la police scientifique. Aucun lien en apparence, serait-on tenté de croire. Et pourtant…

Car ces deux axes, relatés en alternance tout au long du roman, sont parallèles, voire s’interpénètrent pour ne faire plus qu’un. Le dernier hyver, c’est ce que j’appelle un roman-éclaircie, un de ces récits qu’on ne commence à comprendre qu’une fois la mécanique mise en marche, à l’instar du soleil qui perce progressivement les nuages après la tempêtes. Et quelle mécanique, mes ptits poulpes! Implacable, inébranlable, un assemblage de rouages aux dents acérées, qui broient chaque personnage, depuis Hypatie jusqu’à Marie, jusqu’à n’en plus laisser que des chairs en lambeaux.

Et pourtant, toutes ces souffrances, tous ces efforts consentis dans la douleur, tout cela doit bien avoir un but… inavoué, inavouable, peut-être même inhumain, qui sait… Mèneront-ils à la perte de l’humanité, ou à sa transcendance?

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Course-relais historique

Dans ce roman, je considère l’axe historique un peu comme une course-relais. La première à initier le mouvement est Hypatie, notre philosophe martyre. Que cache réellement son meurtre, ignoble et insensé? Et que penser du traitement de son cadavre, démembré et incinéré? Nous tenons là le doigt qui vient appuyer sur le bouton de l’infernale machine, l’initialisation d’un processus qui, près de deux millénaires plus tard, viendra porter ses fruits putrides.

S’ensuit alors une série d’épisodes historiques, présentés comme des flash-back au récit de Marie. On voit à tour de rôle différents personnages célèbres, tels que Leonard de Vinci, Le Pogge, Elizabeth I, Newton, Voltaire, Marie Curie… placés dans un ordre chronologique pur et dur. Chacun reprend ce que le précédent a initié, le travaille à sa manière, le peaufine, le magnifie, et le passe au suivant.

Dans cette curieuse course-relais, le ligne d’arrivée n’est rien d’autre que la vie éternelle, ni plus ni moins. La régénération cellulaire ad vitam aeternam. Rien que ça. Et le témoin, me direz-vous? Ici, point de bâton coloré, cela ne servirait en rien les desseins de nos illustres héros. En revanche, c’est un manuscrit qu’ils s’échangent. Un étrange recueil rédigé au fil du temps par les différentes mains qui l’auront eu en leur possession, et dont le titre se complète au gré de ses propriétaires successifs. Si la thématique n’est guère imaginative (un manuscrit dans un thriller historico-ésotérique, quoi de plus banal), la façon dont elle est traitée est toutefois intéressante et mérite que l’on s’y penche.

Ce qui m’a surtout ébahie, c’est d’une part cette incroyable effusion de détails, et surtout  d’autre part le fait que tous s’emboîtent parfaitement. Rien n’est laissé au hasard dans ces récits d’un autre temps, car le hasard serait un grain de sable dans la machine infernale de l’intrigue. Fabrice Papillon sait à merveille utiliser la réalité historique, d’ailleurs fort bien documentée et étayée, afin de servir son récit et mener le lecteur là où il le désire. Certes, quelques éléments de fiction viennent émailler la vie des différents personnages mémorables que nous rencontrons, afin de faire coller leur réalité avec le récit imaginé par l’auteur. Mais dans l’ensemble, la réalité historique est assez bien respectée. Et c’est ce qui, au final, m’a le plus étonnée. C’est que l’auteur ait pu trouver autant de destins illustres qui, à chaque fois, cadraient si bien avec sa fiction qu’il n’y avait pratiquement pas besoin d’ajouts fictionnels pour rendre le tout crédible. Un tour de maître, vraiment!

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Marie

Le second axe du roman, rapporté au présent, nous raconte l’histoire de Marie, une jeune femme au caractère bien trempé et à la sensibilité exacerbée. Je sais que les deux semblent faire mauvais ménage, et pourtant ils fonctionnent à merveille ensemble, pour façonner une héroïne comme on les aime, toute en finesse et en profondeur.

J’ai beaucoup apprécié le personnage de Marie, parce que je me suis un peu retrouvée en elle (et pas que par le prénom, qui est le même que le mien!). Jeune stagiaire en biologie à la police judiciaire de Paris, elle tente de percer là où la plupart des autres femmes échouent. Car les sciences sont rarement un domaine de femmes, et il lui faut lutter pour prouver sa valeur. Or, Marie est très compétente dans son domaine. Cela frise même le génie. Et ce n’est pas là sa seule qualité!

Car, au fil du récit, on s’aperçoit que Marie est unique en son genre. Cela commence par de violents cauchemars, accompagnés de maux de ventre terribles. Cela commence aussi par une enquête au sein de la PJ, où un cadavre est retrouvé démembré et incinéré. Cette enquête semble avoir un lien avec elle, mais dans quelle mesure? Et d’où lui viennent ces intuitions qui permettent aux enquêteurs d’avancer? Dans sa quête de réponses, elle va comprendre bien plus qu’elle ne l’aurait voulu concernant sa nature, celle de sa mère, de sa sœur jumelle, et des femmes qui les ont précédées.

Les aventures de Marie sont émaillées par une série de flash-back dans le passé. Pas celui de l’héroïne, mais celui de tous ces personnages qui ont contribué à la course-poursuite dont nous parlions tout à l’heure. Ces passages permettent au lecteur de faire la relation entre le contexte historique et ce qui se passe dans le présent. Ils sont le lien entre les deux axes précités. L’idée est très bonne, car cela permet à l’intrigue de se mettre en place de façon progressive, et surtout, l’auteur peut dès lors distiller au compte-goutte ses révélations, et laisser le lecteur pantelant d’attente face à un suspens pratiquement insoutenable. Et elles sont bien cachées, ces révélations! Car le lecteur doit faire preuve de déduction et d’attention pour permettre à la lumière de se faire dans son esprit. C’est un petit jeu de piste ésotérique et historique qu’il nous propose, ni plus ni moins. Et c’est un concept que j’ai beaucoup aimé. Avec un petit bémol toutefois, celui de lire un récit un peu trop haché à mon goût, où l’on passe trop facilement d’un personnage à un autre, d’une époque à une autre. Il faut (trop) souvent faire preuve de souplesse pour effectuer le grand écart sans se déchirer les ligaments littéraires. Ce ne fut pas toujours évident, mais qui sait, peut-être en suis-je sortie plus souple…

Si le personnage de Marie m’est tout de suite apparu comme sympathique, je ne peux pas vraiment en dire autant de l’histoire qui l’entoure. Sans y avoir pour autant été totalement hermétique, certains éléments m’ont laissée moins enthousiaste qu’ils auraient dû. C’est probablement dû au contexte de l’enquête qui, à mon sens, présentait un côté rébarbatif. Je n’ai pas trop accroché avec le caractère des membres de la PJ, à commencer par le commissaire en charge de l’enquête et du stage de Marie. J’ai retrouvé chez certains trop de stéréotypes, trop de redondances. Ce n’est pas encore trop gênant lorsqu’il s’agit de personnages secondaires, mais pour des caractères censés être mis au devant de la scène, c’est presque rédhibitoire. Et puis c’est une enquête « à la française », ce qui signifie qu’il faut se farcir toutes les abréviations inhérentes au système judiciaire français.

Ceci étant, je dois reconnaître un intérêt certain pour quelques parties de la traque du mystérieux tueur, puisque les enquêteurs doivent se rendre… dans les catacombes de Paris! C’est tout un univers souterrain et mystérieux qui s’offre alors à nous. J’ai trouvé une saveur particulière à ces passages (littéraires comme géographiques) qui empestaient bon le moisi humide des murs et les os vermoulus! Et puis j’ai eu le sentiment de découvrir Paris et ses secrets sous un jour nouveau, ce qui ne fut pas pour me déplaire.

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A women’s world

Étant moi-même une femme, il est une chose à côté de laquelle je ne pouvais pas passer… c’est que les femmes sont particulièrement mises à l’honneur dans ce roman. Merci à l’auteur! C’est un fait assez rare pour être surligné…

Dans Le dernier hyver, les femmes sont représentées comme intelligentes et combatives. Si les hommes ne sont pas étrangers à l’avancement de l’histoire, permettant notamment la circulation du fameux manuscrit, ou aidant les femmes dans leur quête, ce sont surtout ces dernières qui font avancer le schmilblick. Et je dois dire que ce n’est pas déplaisant. Ne croyez pas que je sois une féministe avérée, je suis au final une femme qui souhaite juste rétablir l’égalité entre les sexes (et par égalité, j’entends surtout mettre l’accent sur la complémentarité entre l’homme et la femme). Et c’est vrai que dans ce roman, les hommes ont tendance à être un peu plus effacés. Mais ils ont leur rôle malgré tout, et je pense que c’est une histoire qui fera plaisir à toute femme qui se respecte, pour ce côté « mise en valeur de la condition féminine ».

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En résumé…

J’ai vraiment bien accroché avec cette lecture, malgré quelques stéréotypes au niveau des personnages et de l’intrigue ésotérique (mais sont-ils seulement évitables?). La succession d’événements historiques, tous ces éléments (réels comme fictionnels) qui s’imbriquent les uns dans les autres pour former l’intrigue, ce foisonnement de détails, cette précision, et ce suspens distillé goutte à goutte, font de ce roman un véritable page-turner qui plaira à coup sûrs aux amateurs de thrillers historiques à connotation ésotérique.

À lire absolument si vous avez aimé les romans de Dan Brown (Inferno et Da Vinci Code en particulier).

Ma note : 17/20

Une excellente lecture!

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D’autres avis éclairés…

Mr K, chez Le Capharnaüm Éclairé

Gruz, sur EmOtions

Joan’s Kingdom

Mylène, chez Les lectures de Mylènes

Lili, chez Book’n’cook

Un avis contraire chez Fattorius

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Musique d’ambiance…

Cette chronique a été rédigée avec l’appui de quelques très bons albums métalliques que j’ai envie de vous faire découvrir…

Hamferð – Támsins likam

Hamferð est un groupe de doom metal danois formé en 2008. Támsins Likam est leur tout dernier album (2018).

Faal – Desolate grief

Faal est un groupe qui officie dans le genre ô combien ténébreux du doom metal funéraire. Originaire des Pays-Bas, ils viennent juste de sortir leur troisième album, Desolate grief.

Monolithe – Nebula septem

Monolithe, groupe originaire de France, officie également dans le doom metal funéraire.