[Chronique Horreur] L’asile du Nord. 1, Camille, de Carine Paquin

Tout commence par un « innocent » jeu de Ouija entre filles (c’est fou, cette propension qu’ont les adolescents à aimer se faire peur !). Se mêle à cela le décès d’une grand-mère qui, post-mortem, se révèle être plus étrange qu’il n’y paraissait de son vivant. Vous tenez là un cocktail trouble à souhait et qui sent déjà le sapin roussi !

Acherontia

Synopsis

Peu de temps après la mort de sa grand-mère, à l’aube de l’an 2000, une jeune fille de seize ans est internée à l’hôpital psychiatrique. Son diagnostique: schizophrénie paranoïde. Pourtant, certaines personnes de la ville sont convaincues que la petite n’est pas folle, que ce qui l’affecte n’a rien d’humain. Existerait-il quelque chose d’invisible à l’homme qui peut s’emparer de lui et détruire sa vie? Enfermée entre les quatre murs de cet hôpital, que fera Camille quand elle constatera que sa vie ne lui appartient plus? Pour quoi, ou plutôt pour « qui » vit-elle?

Lire la suite

[Chronique thriller historique] Le dernier hyver, de Fabrice Papillon

« Le dernier hyver », c’est ce que j’appelle un roman-éclaircie, un de ces récits qu’on ne commence à comprendre qu’une fois la mécanique bien mise en marche, à l’instar du soleil qui perce progressivement les nuages après la tempêtes. 

Acherontia

Synopsis…

couv7354483

On dit que l’hiver vient. Peut-être le dernier pour les porteurs du chromosome Y…

Août 415 après J-C. : La ville d’Alexandrie s’assoupit dans une odeur âcre de chair brûlée. Hypatie, philosophe et mathématicienne d’exception, vient d’être massacrée dans la rue par des hommes en furie, et ses membres en lambeaux se consument dans un brasier avec l’ensemble de ses écrits.

Cet assassinat sauvage amorce un engrenage terrifiant qui, à travers les lieux et les époques, sème la mort sur son passage. Inéluctablement se relaient ceux qui, dans le sillage d’Hypatie, poursuivent son grand oeuvre et visent à accomplir son dessein.

Juillet 2018 : Marie, jeune biologiste, stagiaire à la police scientifique, se trouve confrontée à une succession de meurtres effroyables, aux côtés de Marc Brunier, homme étrange et commandant de police de la « crim » du Quai des Orfèvres. Peu à peu, l’étudiante découvre que sa propre vie entre en résonance avec ces meurtres.

Est-elle, malgré elle, un maillon de l’histoire amorcée à Alexandrie seize siècles auparavant ? Quel est ce secret transmis par Hypatie et au coeur duquel se retrouve Marie ? L’implacable destin peut-il être contrecarré ou « le dernier Hyver » mènera-t-il inéluctablement l’humanité à sa perte ?

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

La loi d’attraction universelle

J’ai découvert ce roman par le biais de la plateforme Netgalley, que je tiens à remercier au passage, ainsi que les éditions Belfond (auprès de qui je m’excuse platement pour l’énorme délais de chronique).

Je sais qu’il n’est guère dans mes habitudes de faire dans le thriller historique, même si j’apprécie beaucoup le style. Mais la couverture et le résumé ont su capter mon attention, bien plus que je ne l’aurais cru possible. Ce n’est pas tellement l’enquête en elle-même qui m’a attirée, non. Car, de façon générale, les enquêtes policières trop modernes, menées à grand renfort de technologie dernier cri et d’abréviations tirées par les cheveux, ce n’est pas trop mon fort (à moins qu’elle ne soit vue du point de vue du légiste, auquel cas je sens généralement un regain d’intérêt). C’est surtout l’aspect historique qui m’a emballée, et toutes ses implications dans le présent. Parlez-moi de meurtre mystique particulièrement sanglant, de grand oeuvre, de la perte de l’humanité, et je saute sur l’occasion, inévitablement!

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

Mécaniques parallèles

Le roman s’articule autour de deux axes : celui de l’Histoire, cette grande mécanique trop bien huilée dont les événements s’enchaînent tels de machiavéliques rouages, et celui du Présent, incarné par le récit de Marie, jeune biologiste stagiaire à la police scientifique. Aucun lien en apparence, serait-on tenté de croire. Et pourtant…

Car ces deux axes, relatés en alternance tout au long du roman, sont parallèles, voire s’interpénètrent pour ne faire plus qu’un. Le dernier hyver, c’est ce que j’appelle un roman-éclaircie, un de ces récits qu’on ne commence à comprendre qu’une fois la mécanique mise en marche, à l’instar du soleil qui perce progressivement les nuages après la tempêtes. Et quelle mécanique, mes ptits poulpes! Implacable, inébranlable, un assemblage de rouages aux dents acérées, qui broient chaque personnage, depuis Hypatie jusqu’à Marie, jusqu’à n’en plus laisser que des chairs en lambeaux.

Et pourtant, toutes ces souffrances, tous ces efforts consentis dans la douleur, tout cela doit bien avoir un but… inavoué, inavouable, peut-être même inhumain, qui sait… Mèneront-ils à la perte de l’humanité, ou à sa transcendance?

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

Course-relais historique

Dans ce roman, je considère l’axe historique un peu comme une course-relais. La première à initier le mouvement est Hypatie, notre philosophe martyre. Que cache réellement son meurtre, ignoble et insensé? Et que penser du traitement de son cadavre, démembré et incinéré? Nous tenons là le doigt qui vient appuyer sur le bouton de l’infernale machine, l’initialisation d’un processus qui, près de deux millénaires plus tard, viendra porter ses fruits putrides.

S’ensuit alors une série d’épisodes historiques, présentés comme des flash-back au récit de Marie. On voit à tour de rôle différents personnages célèbres, tels que Leonard de Vinci, Le Pogge, Elizabeth I, Newton, Voltaire, Marie Curie… placés dans un ordre chronologique pur et dur. Chacun reprend ce que le précédent a initié, le travaille à sa manière, le peaufine, le magnifie, et le passe au suivant.

Dans cette curieuse course-relais, le ligne d’arrivée n’est rien d’autre que la vie éternelle, ni plus ni moins. La régénération cellulaire ad vitam aeternam. Rien que ça. Et le témoin, me direz-vous? Ici, point de bâton coloré, cela ne servirait en rien les desseins de nos illustres héros. En revanche, c’est un manuscrit qu’ils s’échangent. Un étrange recueil rédigé au fil du temps par les différentes mains qui l’auront eu en leur possession, et dont le titre se complète au gré de ses propriétaires successifs. Si la thématique n’est guère imaginative (un manuscrit dans un thriller historico-ésotérique, quoi de plus banal), la façon dont elle est traitée est toutefois intéressante et mérite que l’on s’y penche.

Ce qui m’a surtout ébahie, c’est d’une part cette incroyable effusion de détails, et surtout  d’autre part le fait que tous s’emboîtent parfaitement. Rien n’est laissé au hasard dans ces récits d’un autre temps, car le hasard serait un grain de sable dans la machine infernale de l’intrigue. Fabrice Papillon sait à merveille utiliser la réalité historique, d’ailleurs fort bien documentée et étayée, afin de servir son récit et mener le lecteur là où il le désire. Certes, quelques éléments de fiction viennent émailler la vie des différents personnages mémorables que nous rencontrons, afin de faire coller leur réalité avec le récit imaginé par l’auteur. Mais dans l’ensemble, la réalité historique est assez bien respectée. Et c’est ce qui, au final, m’a le plus étonnée. C’est que l’auteur ait pu trouver autant de destins illustres qui, à chaque fois, cadraient si bien avec sa fiction qu’il n’y avait pratiquement pas besoin d’ajouts fictionnels pour rendre le tout crédible. Un tour de maître, vraiment!

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

Marie

Le second axe du roman, rapporté au présent, nous raconte l’histoire de Marie, une jeune femme au caractère bien trempé et à la sensibilité exacerbée. Je sais que les deux semblent faire mauvais ménage, et pourtant ils fonctionnent à merveille ensemble, pour façonner une héroïne comme on les aime, toute en finesse et en profondeur.

J’ai beaucoup apprécié le personnage de Marie, parce que je me suis un peu retrouvée en elle (et pas que par le prénom, qui est le même que le mien!). Jeune stagiaire en biologie à la police judiciaire de Paris, elle tente de percer là où la plupart des autres femmes échouent. Car les sciences sont rarement un domaine de femmes, et il lui faut lutter pour prouver sa valeur. Or, Marie est très compétente dans son domaine. Cela frise même le génie. Et ce n’est pas là sa seule qualité!

Car, au fil du récit, on s’aperçoit que Marie est unique en son genre. Cela commence par de violents cauchemars, accompagnés de maux de ventre terribles. Cela commence aussi par une enquête au sein de la PJ, où un cadavre est retrouvé démembré et incinéré. Cette enquête semble avoir un lien avec elle, mais dans quelle mesure? Et d’où lui viennent ces intuitions qui permettent aux enquêteurs d’avancer? Dans sa quête de réponses, elle va comprendre bien plus qu’elle ne l’aurait voulu concernant sa nature, celle de sa mère, de sa sœur jumelle, et des femmes qui les ont précédées.

Les aventures de Marie sont émaillées par une série de flash-back dans le passé. Pas celui de l’héroïne, mais celui de tous ces personnages qui ont contribué à la course-poursuite dont nous parlions tout à l’heure. Ces passages permettent au lecteur de faire la relation entre le contexte historique et ce qui se passe dans le présent. Ils sont le lien entre les deux axes précités. L’idée est très bonne, car cela permet à l’intrigue de se mettre en place de façon progressive, et surtout, l’auteur peut dès lors distiller au compte-goutte ses révélations, et laisser le lecteur pantelant d’attente face à un suspens pratiquement insoutenable. Et elles sont bien cachées, ces révélations! Car le lecteur doit faire preuve de déduction et d’attention pour permettre à la lumière de se faire dans son esprit. C’est un petit jeu de piste ésotérique et historique qu’il nous propose, ni plus ni moins. Et c’est un concept que j’ai beaucoup aimé. Avec un petit bémol toutefois, celui de lire un récit un peu trop haché à mon goût, où l’on passe trop facilement d’un personnage à un autre, d’une époque à une autre. Il faut (trop) souvent faire preuve de souplesse pour effectuer le grand écart sans se déchirer les ligaments littéraires. Ce ne fut pas toujours évident, mais qui sait, peut-être en suis-je sortie plus souple…

Si le personnage de Marie m’est tout de suite apparu comme sympathique, je ne peux pas vraiment en dire autant de l’histoire qui l’entoure. Sans y avoir pour autant été totalement hermétique, certains éléments m’ont laissée moins enthousiaste qu’ils auraient dû. C’est probablement dû au contexte de l’enquête qui, à mon sens, présentait un côté rébarbatif. Je n’ai pas trop accroché avec le caractère des membres de la PJ, à commencer par le commissaire en charge de l’enquête et du stage de Marie. J’ai retrouvé chez certains trop de stéréotypes, trop de redondances. Ce n’est pas encore trop gênant lorsqu’il s’agit de personnages secondaires, mais pour des caractères censés être mis au devant de la scène, c’est presque rédhibitoire. Et puis c’est une enquête « à la française », ce qui signifie qu’il faut se farcir toutes les abréviations inhérentes au système judiciaire français.

Ceci étant, je dois reconnaître un intérêt certain pour quelques parties de la traque du mystérieux tueur, puisque les enquêteurs doivent se rendre… dans les catacombes de Paris! C’est tout un univers souterrain et mystérieux qui s’offre alors à nous. J’ai trouvé une saveur particulière à ces passages (littéraires comme géographiques) qui empestaient bon le moisi humide des murs et les os vermoulus! Et puis j’ai eu le sentiment de découvrir Paris et ses secrets sous un jour nouveau, ce qui ne fut pas pour me déplaire.

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

A women’s world

Étant moi-même une femme, il est une chose à côté de laquelle je ne pouvais pas passer… c’est que les femmes sont particulièrement mises à l’honneur dans ce roman. Merci à l’auteur! C’est un fait assez rare pour être surligné…

Dans Le dernier hyver, les femmes sont représentées comme intelligentes et combatives. Si les hommes ne sont pas étrangers à l’avancement de l’histoire, permettant notamment la circulation du fameux manuscrit, ou aidant les femmes dans leur quête, ce sont surtout ces dernières qui font avancer le schmilblick. Et je dois dire que ce n’est pas déplaisant. Ne croyez pas que je sois une féministe avérée, je suis au final une femme qui souhaite juste rétablir l’égalité entre les sexes (et par égalité, j’entends surtout mettre l’accent sur la complémentarité entre l’homme et la femme). Et c’est vrai que dans ce roman, les hommes ont tendance à être un peu plus effacés. Mais ils ont leur rôle malgré tout, et je pense que c’est une histoire qui fera plaisir à toute femme qui se respecte, pour ce côté « mise en valeur de la condition féminine ».

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

En résumé…

J’ai vraiment bien accroché avec cette lecture, malgré quelques stéréotypes au niveau des personnages et de l’intrigue ésotérique (mais sont-ils seulement évitables?). La succession d’événements historiques, tous ces éléments (réels comme fictionnels) qui s’imbriquent les uns dans les autres pour former l’intrigue, ce foisonnement de détails, cette précision, et ce suspens distillé goutte à goutte, font de ce roman un véritable page-turner qui plaira à coup sûrs aux amateurs de thrillers historiques à connotation ésotérique.

À lire absolument si vous avez aimé les romans de Dan Brown (Inferno et Da Vinci Code en particulier).

Ma note : 17/20

Une excellente lecture!

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

D’autres avis éclairés…

Mr K, chez Le Capharnaüm Éclairé

Gruz, sur EmOtions

Joan’s Kingdom

Mylène, chez Les lectures de Mylènes

Lili, chez Book’n’cook

Un avis contraire chez Fattorius

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

Musique d’ambiance…

Cette chronique a été rédigée avec l’appui de quelques très bons albums métalliques que j’ai envie de vous faire découvrir…

Hamferð – Támsins likam

Hamferð est un groupe de doom metal danois formé en 2008. Támsins Likam est leur tout dernier album (2018).

Faal – Desolate grief

Faal est un groupe qui officie dans le genre ô combien ténébreux du doom metal funéraire. Originaire des Pays-Bas, ils viennent juste de sortir leur troisième album, Desolate grief.

Monolithe – Nebula septem

Monolithe, groupe originaire de France, officie également dans le doom metal funéraire.

[Chronique fantastique] L’enfer est complet en cette saison, de Solade

Le roman se laisse lire tout seul. Il ne me laissera peut-être pas un souvenir impérissable, mais il m’a permis de beaux moments de détente.

Acherontia

Synopsis

couv69878499Entendant le doux nom des Caraïbes, vous vous projetez sûrement des images en trois dimensions de plages de sable fin et d’eau turquoise. Le tableau aurait pu être idyllique. Malheureusement, considérant la situation dans laquelle je me trouvais, la seule eau dont je pouvais vous faire miroiter les reflets était celle d’une mangrove pullulante de vie, et en lieu et place d’une plage j’eus droit à un vicieux piège végétal. Et c’était sans compter _la chose_ qui en avait après moi…
Jusqu’à récemment, Sacha était persuadé de mener une vie tranquille et solitaire en venant s’exiler sur cette île quelques années plus tôt. C’était là son ultime essai de se rapprocher de parents qu’il avait à peine connus, avant que ces derniers, toujours en voyage, ne disparaissent complètement de sa vie lors d’une tempête en pleine mer. Habitué à une certaine marginalité et une apathie certaine, c’est sans aucun doute ce qui lui permit de garder un recul tout relatif à la série d’événements insolites qui débuta un soir de novembre. Dès lors, c’est tout un autre monde qui se dévoila à lui, avec autant d’effet qu’un changement de saisons… ou presque.

ob_f1db21_ob-87907a-ob-e4af08-ob-32a13f-ob-b02a3

La loi d’attraction universelle

J’ai découvert ce roman par le biais de la plateforme Netgalley, que je tiens à remercier au passage, ainsi que les éditions MxM Bookmark (auprès de qui je m’excuse platement pour l’énorme délais de chronique).

Ce qui m’a attirée vers cette lecture, c’est surtout l’originalité du titre qui m’a prêté à sourire, mais surtout l’évocation des Caraïbes, et une certaine référence à la magie vaudou.

Lire la suite

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d’Olivier Gay

Si vous cherchez une héroïne qui en a dans la culotte sans se la jouer, un ténébreux héros un rien gaffeur sur les bords, de la magie pleine de fraîcheur qui ne réinvente peut-être pas le genre mais qui divertit à coup sûr, alors ce roman est fait pour vous!

Acherontia

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Chloé, élève en seconde, assiste un jour par hasard à un combat à l’épée entre Thomas, un élève d’une autre classe qu’elle connaît à peine, et une sorte de démon. L’adolescente tente d’intervenir mais est blessée et perd connaissance. A son réveil, la créature est morte et Thomas lui explique qu’il est un mage et que sa mission est de repérer et fermer les failles vers le monde des démons.

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Playlist Spotify

Acherontia’s chronicles – Le coeur et le sabre

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay
[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Je tiens d’abord à remercier les éditions Castelmore pour ce service presse. C’est une lecture que j’avais demandé sur la plateforme Netgalley.fr, et cela m’a fait très plaisir d’être sélectionnée pour le lire et le chroniquer!

Pourquoi ai-je demandé cette lecture en particulier? Parce que cela faisait un petit moment que j’entendais parler d’Olivier Gay, que je n’avais encore rien lu venant de lui, et que je me disais qu’il serait grand temps de remédier au problème, tout simplement. Après, il faut avouer que la couverture et le résumé ont beaucoup influencé mon choix… Mais quel lecteur ne se laisserait pas influencer par eux, hein?

Ma mère était devant son chevalet, comme d’habitude lorsqu’elle ne traînait pas sur les sites de rencontre. Elle semblait convaincue qu’elle avait du talent. Moi aussi, je l’avais longtemps cru, je l’avais même encouragée dans sa passion. Mais, depuis que Papa était parti, elle semblait se contenter de vivre de la prestation compensatoire en attendant qu’une éventuelle galerie daigne la transformer en star.
Elle leva vaguement les yeux vers moi puis retourna à sa peinture. Deux diffuseurs d’encens ne suffisaient pas à couvrir l’odeur de la térébenthine.
– Il y a quelques restes dans le frigo, et j’ai fait une salade de pâtes.
Pas de « bonjour », pas de « comment s’est passée ta journée », ni même un « alors, pourquoi rentres-tu si tard? ».
D’habitude, je ne m’en offusquais pas ; ces derniers temps, ma mère n’était que l’ombre d’elle-même. Ce soit, pourtant…

Le coeur et le sabre, d’Olivier Gay

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay
[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

La première chose qui m’a frappé dans ce roman (aïe…), ce sont les deux personnages principaux. Ils ne représentent en rien l’archétype du super-héros, sans être pour autant des antihéros. Ils se situent à la frontière des deux, ce qui les rend au final très humains, et c’est ce qui me plaît chez eux.

Il y a Chloé, qui est une adolescente de taille démesurée, et donc d’un naturel maladroit, ce qui la mène souvent à des situations rocambolesques, voire drôlissimes. Ses problèmes familiaux lui confèrent une profondeur et un background historique intéressants ; son père est parti quelques années plus tôt au bras d’une femme plus âgée que sa mère, et cette dernière se réfugie dans l’alcool et la peinture, ne consacrant plus assez de temps à Chloé. La mère et la fille vont tenter de se rapprocher tout au long du récit, mais il faudra du temps à la mère pour comprendre ce que sa fille attend d’elle et pour l’appliquer. Chloé n’est pas à proprement dit la fille la plus populaire de son lycée, loin s’en faut. Mais à défaut de popularité, elle possède un franc parler tout à fait délectable qui prête le lecteur à sourire à de nombreuses reprises.

Et puis il y a Thomas, cet adolescent qui se la joue ténébreux et qui s’avère être un très gentil garçon, dans le genre mage foireux. Parce que, oui, Thomas est mage, comme vous allez le voir dans la suite…

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Dans le Paris décrit par Olivier Gay, la magie existe bel et bien. Elle y est même plus puissante qui partout ailleurs. Ce n’est peut-être pas celle du monde de Harry Potter (et encore…), mais plutôt une magie qui joue avec les élémentaux et les forces de la nature.

Dans ce Paris, il y a aussi des failles qui donnent sur d’autres univers et que les mages doivent colmater afin d’éviter une invasion de goules et autres monstres indésirables. C’est le rôle de Thomas, et c’est d’ailleurs dans l’exercice de cette fonction qu’il rencontrera Chloé. Lors d’un combat avec une goule, alors qu’il est en mauvaise posture, Chloé vient à sa rescousse mais manque de mourir par la même occasion. Pour la sauver, Thomas n’a qu’une solution…

Thomas recula de nouveau. Comme tout à l’heure, il agita sa main gauche à hauteur de son visage.
– Air et feu, Feu follet, Viens et Frappe, Danse et Brûle, Feu follet, Air et Feu, Chante et Tue…
Une bille de lumière se forma sans sa main, grandissant alors qu’il psalmodiait.
OK, on venait officiellement d’entrer dans le grand n’importe quoi. Qu’est-ce qu’il essayait de faire? Et c’était quoi, ces paroles pourries? On aurait dit une chanson de RnB.
Je perdais pied – dans tous les sens du terme. Mes bras et mes jambes s’engourdissaient. J’avais beau être musclée, cela faisait presque cinq minutes que je pendouillais ainsi. Mais je n’avais pas envie de descendre pour autant.
Thomas n’eut pas le temps de finir son improbable litanie. L’homme se fendit de nouveau et manqua de le toucher au poignet. Puis il feinta, un mouvement bas et long qui trompa la garde du garçon.

Le coeur et le sabre, d’Olivier Gay

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

… Faire subir à Chloé un rituel qui est normalement interdit pour son rang : celui de l’Adoubement. Chloé devient alors le chevalier servant de Thomas, littéralement. Elle devra le protéger envers et contre tout des monstres qui le menacent tandis qu’il tisse ses rituels. Pour mener à bien sa mission, Chloé se voit « augmentée » de pouvoirs extraordinaires ; mais cela, je vous le laisse découvrir dans le roman… Ce ne serait pas comique, si je vous disais tout!

Qui dit Chevalier dit aussi épée. Ou plutôt sabre, en ce qui nous concerne. Et cela tombe bien, car Chloé est justement une vraie cheffe en matière d’escrime! Elle se débrouille même tellement bien qu’elle est sur le point de se rendre à un tournoi qui pourrait faire d’elle une escrimeuse professionnelle.

C’est d’ailleurs, selon moi, un des gros points forts de ce roman. Je ne sais pas si l’auteur pratique lui-même l’escrime, ou s’il s’est très bien documenté sur ce sport, mais quoi qu’il en soit, les descriptions semblaient très réalistes. On voit qu’Olivier Gay maîtrise bien son sujet, sans toutefois inonder le lecteur sous les termes techniques et les descriptions de combat à rallonges.

Et le mousquetaire, dans tout ça, me direz-vous? Ah ben ça… Je vous laisse le découvrir!

Il se leva, et se planta juste devant moi. Je n’avais pas pu juger de sa taille alors qu’il était assis, mais il arrivait presque à ma hauteur, avec de larges épaules et des mains comme des battoirs. Il avait dû être une vraie force de la nature avant que la vieillesse le rattrape. De nouveau, je cherchai à deviner son âge. Soixante ans? Plus?
– Thomas nous a forcé la main. Il a réalisé un rituel qu’il ne devait faire sous aucun prétexte. Il devait attendre le jour de ses dix-huit ans pour se lier avec un Chevalier et, au lieu de ça…
– Ce n’est pas la première fois que j’entends ce mot, intervins-je. Qu’est-ce que ça veut dire?
Ha! Chacun son tour de se faire interrompre. Mais la plaisanterie n’était pas du goût de Mickael. Il se pinça l’arête du nez avant de reprendre, la voix glaciale :
– Un Chevalier est un homme dévoué à notre cause, qui se retrouve doté de capacités extraordinaires pour nous protéger. Nous, les Mages.
– Mais…
– Ce n’est pas un rôle pour une femme. Depuis quatre mille ans, tous les Chevaliers sont des hommes. Et nous allons devoir supporter les conséquences de son erreur ridicule.

Le coeur et le sabre, d’Olivier Gay

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Le seul réel bémol que je peux émettre concernant ce roman, ce sont les méchants de l’histoire, les fameuses goules. Qui sont-ils/elles? D’où viennent-ils/elles? D’un univers parallèle certes, mais on ne sait pas grand-chose de cet univers, et c’est bien dommage. Peut-être est-ce réservé au tome suivant? Mais moi, j’aurais bien aimé un petit mot d’explication les concernant. Déjà, pourquoi les appelle-t-on « goules »?

Il y a bien un élément d’explication quant au fait qu’elles essaient constamment d’envahir l’univers de Chloé et Thomas, mais je le trouve un peu léger, j’aurais vraiment apprécié d’en savoir plus, ou au moins savoir que de plus amples informations me seront fournies au prochain numéro…

– Il paraît que tu connais de nombreux rituels, observa l’homme en avançant d’un pas, testant la lame de son adversaire.
– Il paraît.
– Tu penses que cela va m’arrêter?
– En tout cas, ça t’a fait réfléchir. Tu ne devais pas me percer le coeur?
L’homme eut un rire froid. De nouveau, il avança. De nouveau, les lames s’entrechoquèrent. De nouveau, Thomas prit de la distance. Je constatai avec surprise qu’ils étaient plutôt doués. Malgré leur position peu orthodoxe, ils se déplaçaient avec la souplesse d’escrimeurs-nés. Oui, ils étaient bons – mais pas exceptionnels. Même d’aussi haut, je pouvais voir des trous béants dans leur garde. Mon prof les aurait traités de tous les noms.
Fascinée, je contemplai ce ballet incompréhensible sans intervenir, sans prononcer le moindre mot. J’en oubliai même mes mains douloureuses à force de serrer cette maudite corde. Tout cela n’avait aucun sens.

Le coeur et le sabre, d’Olivier Gay

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay
[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

J’ai vraiment adoré tout ce qui était lié à la magie dans ce roman. Ce n’est peut-être pas ce qui s’est fait de plus original, cela ne réinvente clairement pas le fantastique moderne, mais j’ai aimé la fraîcheur du concept La façon dont celui-ci est traité, aussi, avec beaucoup de simplicité et de candeur. Dieu merci, on est lui de la bit-lit pour grands ados aux hormones bouillonnantes, où les scènes de fesses crues et vulgaires sont plus présentes que les éléments fantastiques censés pourtant abonder. Certes, il y a bien un peu de romance, mais on est beaucoup plus proche des premiers émois adolescents que de la littérature érotico-pornographique.

Le personnage de Chloé est ce qui m’a le plus convaincue dans ce roman. Je l’ai appréciée pour ses qualités autant que pour ses défauts. Ses réparties étaient drôles, sa maladresse était attendrissante, et je ne doute pas que bon nombre d’adolescentes pourront s’identifier à elle, que ce soit dans son manque de popularité à l’école ou dans ses difficultés familiales.

L’écriture d’Olivier Gay est fluide et agréable à lire. Quelques cliffhangers viennent ponctuer et rythmer le récit, lui conférant un côté addictif très plaisant. Je dois bien avouer que j’avais hâte de retrouver ma lecture chaque jour et de tourner les pages pour voir ce qui allait s’y passer. Certes, le combat final est peut-être un tantinet trop « easy », on se serait cru dans une grosse production hollywoodienne où les héros réussissent à tuer tous les méchants d’un coup de cuillère à pot. Heureusement, la toute fin vient tout sauver, avec l’arrivée d’un personnage aux pouvoirs un peu particuliers, ainsi que de révélations finales qui laissent pantois et donnent envie de se réjouir du tome suivant.[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay
[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

N’hésitez pas à rejoindre notre petite communauté sur la page Facebook du blog! Plus on est de fous, plus on s’amuse ^^

Retrouvez-moi aussi sur Twitter, sur le compte @Acherontia_Nyx, ou sur Instagram, sur le compte Acherontia Nyx!

Votre dévouée,

Acherontia

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay
[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Lianne (De livres en livres)

Althea (Althea’s books)

Agathe Lou Lp (Les lectures d’Agathe)

Lady Chantilly (Lady Chantilly bouquine)

Chems (Chems book)

Maud Bonnefond (Des livres / une fille)

[Chronique jeunesse] La magie de Paris. T1, Le coeur et le sabre, d'Olivier Gay

Lu dans le cadre des challenges…

Littérature de l’imaginaire 2017

Défi lecture 2017

n°22 – Un livre dans lequel il pleut

Challenge Si j’étais un livre #3

…Je serais le premier tome d’une saga