Une excellente fin de première trilogie, haletante à souhait malgré quelques longueurs. Et surtout, une magnifique introduction pour la seconde trilogie à venir. Je pense que j’irai acheter les trois tomes suivants les yeux fermés!
Acherontia
Synopsis
La marque de Kushiel dans l’oeil de Phèdre nô Delaunay fait d’elle une élue, et lui vaut d’éprouver à jamais le plaisir dans la souffrance. Sur son chemin semé de dangers, elle peut compter sur le moine guerrier Joscelin. Bien que la nature de Phèdre soit une source perpétuelle de tourments pour eux deux, Joscelin lui demeure indéfectiblement fidèle. Jamais il n’a trahi son serment: protéger et servir. Mais le destin lui réserve une ultime épreuve. En effet, Phèdre n’a jamais oublié Hyacinthe, son ami d’enfance et, depuis dix ans, elle cherche en vain la clé qui le libérerait de son asservissement éternel. Car Hyacinthe a conclu un pacte avec les dieux pour se sacrifier à la place de son amie et sauver sa patrie. Aussi Phèdre saisit-elle la dernière chance qui lui est donnée de le sauver. Cette quête la conduira au bout du monde, par-delà des royaumes où règne la folie, à la merci de seigneurs de guerre déments et cruels, et face à un pouvoir si immense et terrifiant que personne n’ose en prononcer le nom…
Milady
2014
950 pages
À conseiller…
- Si vous êtes bon lecteur et que vous aimez/n’avez pas peur de vous lancer dans une longue série constituée de pas moins de neuf briques de presque mille pages chacune…
- Si vous avez envie d’une fantasy historique addictive et très immersive qui vous fera découvrir l’Europe et l’Afrique autrement.
- Si vous aimez les héroïnes hors du commun qui en ont dans la culotte…
À éviter…
- Si un brin d’érotisme un rien sado-maso peu choquer votre sensibilité.
- Si vous craignez de vous perdre dans un texte trop long et/ou dans un univers trop fouillé.
- Si vous avez envie de simplicité, d’une histoire sans prise de tête.
Du pur Phèdre…
Phèdre nó Delaunay de Montrève, toujours égale à elle-même… une héroïne hors du commun, brillante, intelligente, aventureuse, courageuse, et pourtant terriblement humaine, avec un cœur grand comme le poing d’un géant. Une héroïne qui pourrait paraître un peu trop surréaliste, trop parfaite aux yeux de certains chez qui la magie n’opérerait pas. Certes, je ne vous le cache pas, sa propension à avoir mille qualités est parfois assez louche. Qui pourrait se targuer, en l’espace d’une décennie, d’avoir appris six ou sept langues, tout en ayant étudié la géographie, la politique, les secrets de la Cour de nuit, et en ayant bourlingué comme l’a fait Miss de Montrève? Personne, je crois bien…
Après, si l’on passe outre cet aspect trop héroïque et ces apparences trop parfaites, on peut y trouver, non pas des défauts, mais des failles. Un peu comme lorsque l’on s’approche plus près d’une céramique qui paraissait si belle, et que l’on y décèle d’infimes craquelures. Trop d’aventures vécues, trop de coups du sort ont fini par abîmer le beau vernis, ont entamé ce qu’il y a de plus beau et de plus cher chez un être humain : l’âme. Voilà ce qui la rend attachante et vraie aux yeux de ceux qui sauront aller au-delà de son apparente perfection.
Dans ce troisième volet, Phèdre ne sera d’ailleurs pas épargnée. Entre intrigues politiques, disparitions d’enfants, voyage aux confins de l’Afrique, violences subies au nom d’un dieu chaotique et pervers, rien ne viendra adoucir son épopée, si ce n’est son dénouement, pourvu qu’elle atteigne le but recherché, celui de sauver son ami Hyacinthe, prisonnier d’une île battue aux quatre vents, condamner à vieillir sans jamais pouvoir rendre l’âme.
Les quelques faiblesses de notre héroïne sont durement mises à l’épreuve. Entre le désarroi de Mélisande, pour qui elle ressent encore une attirance magnétique malgré son amour pour Joscelin, et l’épreuve de Hyacinthe, qui aurait pu être bien plus qu’un ami, Phèdre se voit ballottée par des flots de sentiments contradictoires. Ce n’est donc pas un triangle, mais un carré amoureux dont nous discernons les contours. Qui plus est, elle et Joscelin s’apprêtent à découvrir l’immensité de l’amour parental. Et ne vous y trompez pas, car il y a bien des façons de devenir parents… Je dis ça, je ne dis rien ^^
Du pur Jacqueline Carey…
Depuis les premières pages du premier tome, je dois dire que je suis assez fan du style de Jacqueline Carey. Elle seule a le chic pour les grandes et longues épopées qui restent passionnantes de bout en bout. Enfin… j’ai tout de même trouvé à ce troisième tome quelques longueurs qui ont un tantinet nui à ma lecture, notamment ces interminables récits de voyage qui, s’ils mettent délicieusement dans l’ambiance, n’en restent pas moins des freins au récit. Je pense que l’histoire n’aurait pas souffert de 150 ou 200 pages en moins. Oui, cela paraît beaucoup, mais sur pratiquement 1000 pages, je vous assure que cela fait la différence!
Ceci étant, le lecteur rompu à son style ne s’y trompera pas. On retrouve indubitablement, dans ce troisième volet, sa patte inimitable. Le langage est relativement soutenu tout en restant accessible à un large public, les constructions de phrase sont relativement complexes mais plaisantes. Quant à la conjugaison, on est toujours sur l’utilisation d’un passé simple à l’état brut, avec des « -â/î/ûmes » à tout va. Loin de rebuter, ce mode confère au texte un petit côté épique qui colle parfaitement à son propos.
Je dirais donc que l’on est sur une série de roman accessible à tout un chacun, mais où l’auteur ne prend pas ses lecteurs pour des imbéciles. Et c’est très appréciable, étant donné la tendance actuelle à tout simplifier à outrance.
L’avènement d’une nouvelle trilogie
Comme vous le savez peut-être déjà, Kushiel est en fait un assemblage de trois trilogies différentes. « Kushiel », d’abord, puis « Imriel », et ensuite « Kushiel’s legacy » (pas encore traduite à l’heure actuelle). Ici, nous arrivons à la fin de la première trilogie, et donc, très logiquement, comme elles sont toutes liées, il fallait bien que ce troisième tome introduise la seconde trilogie à venir. Ce qu’a très bien fait l’auteur, il faut le reconnaître.
Dans ce volet, nous découvrons donc un personnage inédit, celui d’Imriel. Il avait certes déjà été évoqué dans le tome précédent, mais ici, on le découvre enfant, en tant que personnage actif de l’histoire. Et il faut dire que le fils de Mélisande ne déçoit pas ! Il est tel qu’on se le figure, bel et rebelle à souhait. Un nouveau personnage qui ne manquera pas de faire chavirer les cœurs de tous ceux qu’il croisera, les personnages comme les lecteurs.
À l’issue du récit, on en redemande, assurément !
Voyage voyage…
Si l’on peut reprocher au texte quelques longueurs bien inutiles, on ne peut cependant que s’émerveiller devant la richesse des paysages et des peuples que l’auteur nous propose. Entre le Menekhet et le Kebbel-im-Akkad, qui représentent l’Afrique du Nord, le Jebe-Barkal qui ressort plus de l’Afrique profonde, le pays de Saba, et aussi le Drujan, pays fantomatique dirigé par un dieu assoiffé de sang, la palette est large, et le lecteur est amené à voyager de terres sauvages et hostiles à des cités reculées de tout.
Moi qui aime depuis toute jeune les récits de voyage, qui lisait régulièrement le magazine Geo lorsque j’étais ado, voilà qui ne pouvait que me ravir. Car au-delà de l’aspect fantasy, l’on sent que l’auteur s’est documentée, ou a visité les pays qu’elle décrit. Tout est bien sûr arrangé à la sauce Kushiel, mais cela n’en est pas moins dépaysant et agréable.
Mention spéciale pour Darshanga
Je ne vais pas m’attarder sur ce point, car j’ai trop peur de vous spoiler les meilleurs passages du récit ! Sachez toutefois que, parmi les épreuves que Phèdre et Joscelin auront à traverser, il y aura le Drujan et la citadelle de Darshanga. Un pur moment de peur et de folie ! Si j’ai trouvé certains passages, notamment ceux du zénana, très longs, d’autres sont d’une cruauté parfaite, qui donnent un côté profond et dramatique au récit. Je crois que Phèdre ne sera jamais descendue aussi bas, dans la violence subie comme dans l’exploration de ses atypiques penchants.
J’aurais toutefois bien vu une descente plus bas encore dans la cruauté et les travers de l’âme humaine. Mais ce n’est qu’un point de vue personnel, rompue que je suis aux récits d’épouvante/gore. Je peux comprendre que, pour atteindre un large public, l’auteur ne pouvait pas, ou n’avait pas l’envie, d’aller trop loin dans ses propos.
En résumé
Une excellente fin de première trilogie, haletante à souhait malgré quelques longueurs. Et surtout, une magnifique introduction pour la seconde trilogie à venir. Je pense que j’irai acheter les trois tomes suivants les yeux fermés! Phèdre y est, comme à son habitude, à son plus haut niveau, malgré les épreuves. Joscelin, quant à lui, va connaître ses moments les plus difficiles. Mais quel homme ! Je doute qu’il en existe beaucoup, des comme ça. Quant à Imriel, on ne fait que le découvrir, mais il présage déjà de très bons moments de lecture…
Ma note : 17/20
Quelques mots au sujet de l’auteur
Jacqueline Carey (née en 1964 à Highland Park, Illinois) est écrivaine et romancière, particulierement de fantasy et de fiction.
Jacqueline Carey a étudié au Lake Forest College dans l’Illinois et y a reçu son B.A en psychologie et en littérature. Pendant ses études, elle travaille six mois dans une librairie Londonienne dans le cadre d’un programme d’échange. C’est durant cette période qu’elle décide de devenir écrivain. A son retour, elle commence sa carrière tout en travaillant dans le centre artistique d’un collège local.
Dix ans plus tard, en 2001, elle rencontre le succès avec l’univers de Kushiel qui comprend aujourd’hui 3 trilogies, mais aussi avec les séries « The Sundering », « Santa Olivia » et « Agent of Hel ».
Jacqueline Carey vit actuellement dans le Michigan.
(source : Babelio.com)
Challenges associés
Lettre C – « Carey »
Les deux trilogies ont été d’excellentes lectures ^^
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