
Second opus des poésies machvaliennes. Pour rappel, voici la présentation que j'en faisais la semaine dernière :
En triant mes étagères hier, je suis tombée sur mes anciens carnets de poésie, que j'ai pris plaisir à relire. Ils ont été écrits pour la plupart en 2007, alors que j'entamais de peu ma vingtaine. Bien souvent, j'écrivais pendant mes heures de cours, accompagnant mes vers de petits croquis et autres élucubrations bizarroïdes. J'ai toujours beaucoup pratiqué l'école buissonnière mentale, voyez-vous.
Il n'est pas dans mes habitudes de mettre des choses trop personnelles sur ce blog. Certes, je me dévoile toujours un peu, au travers de mes "Belles histoires de Mamy Acherontia", ainsi que de ces petites annotations qui fourmillent dans mes articles. Ce n'est pas dans mon habitude de trop en dire, parce que ce n'est pas le propos de ce blog, et que nombre d'éléments de ma petite vie ne regardent que moi. Et pourtant, écrire, c'est mettre à nu nos pensées. Si je souhaite aller dans la direction de l'écriture, je dois apprendre dès maintenant à accepter cet état de fait.
Certes, les sentiments dont il est question sont bien naïfs, et je ne respecte guère les règles d'usage en poésie, mais je les aime bien. Ils sont le reliquat d'une vie que je croyais morte et oubliée. Une vie où mon nom de plume (et de scène quand je jouais de la harpe de façon sérieuse) était Mac'hvala, un temps où la solitude m'inspirait aussi bien qu'elle me désolait. Ces poèmes, contrairement à ce qu'ils laissent penser, n'avaient pas de destinataire. Ils n'étaient qu'un reflet onirique de ce que j'attendais de la vie, une façon de transcender la douleur de mes vieilles blessures, de tirer de la noirceur du monde un peu de beauté.
Voici treize petits textes sélectionnés parmi les pages de mes carnets noircis d'encre. D'autres viendront sans doute compléter la collection.
Pour explication, dans mes carnets, les noms communs portaient tous une majuscule, comme en allemand. J'ai laissé cette graphie telle quelle. À l'époque, après une première année d'étude peu convaincante chez les bibliothécaires-documentalistes, je m'apprêtais à rejoindre l'Université pour entamer des études germaniques. J'étais alors en grande admiration pour Rammstein, Oomph!, Megaherz, Eisbrecher et d'autres groupes de metal allemands, et cela se ressentait jusque dans ma façon d'écrire.
Mais si vous avez peu de goût pour la musique germanique, vous pouvez accompagner ces bribes poétiques par la musique d'artistes tels que Ghost Brigade, Katatonia, Novembers Doom, A Pale Horse Named Death, Swallow The Sun, Insomnium, Daylight Dies, Antimatter, Dark The Suns… Ils conviendront très bien à l'ambiance que j'ai cherché à rendre dans ces poèmes.
[Poème acrostiche]
Aurore boréale qui brille dans mes Yeux
Roulent de lourds Larmes le long de mes Joues
Arrosent la Mélancolie des Jours heureux
Innondent ma Nef, fout pourrir ma Proue
Girophare de Souffrance dans le Ciel de ma Nuit
Nocive comme une Fleur de Digitale
Enlève la Lumière des Espoirs détruits
Évicère la Chair, suce la Substance vitale
Docilement je me couche pour ne pas souffrir
Un Souffle de Mort passe en hurlant par-delà mes Rires
Mais ta Main tendue est encore si faible
Avançant à Tâtons dans l’Obscurité
Tentant en vain de m’agripper
Il vient à moi, je le sens approcher
Néant, ce n’était qu’un Mirage, une Image délavée
Car tout n’est que Leurre
Heurtant chaque Seconde l’Écho de mes Cris
Agonisant avec les Heures
Giclant vers mes Yeux épris
Retour de Flammes froides comme la Cendre
Il est loin le Temps où je pouvais m’étendre
Nonchalament dans les Herbes mouvantes.
Mac’hvala, 2007
[Poème acrostiche]
Alors, la Chaîne se brisera
L’Étincelle de Vie pétillera
Ou est-ce le Soleil sur le
Rebord de ta Fenêtre?
Sont-ce tes Pas que
J’entends approcher?
Mac’hvala, 2007
J’ai de plus en plus souvent froid la Nuit
Lorsque je sens le Vide de l’autre Côté du Lit
Mes Mains te cherchent à Tâton dans le Noir
Elles ne rencontrent qu’un Silence mort et glacial
J’aurais envie de poser ma Tête le Soir
Sur ta Poitrine, la Joue sur ta Peau pâle
Y entendre battre la Vie, ton Souffle, ton Coeur
Me repaître de tes Regards et de leur Chaleur
Écouter la Musique de ta Voix avant de sombrer
M’allonger dans tes Bras pour ne plus m’éveiller.
Mac’hvala, 2007
Je suis allée me promener dans le Vallon
La Terre du Chemin me renvoyait l’Écho de tes Pas
Je n’ai jamais eu tant Envie de suivre ta Voie
Mais la Poussière a effacé tes Traces à sa Façon
Et depuis tu me poursuis, Solitude…
J’ai longé les Berges abruptes de l’Étang
Dans l’Eau verte j’ai cru voir miroiter ton Regard
À la Surface des Reflets comme des Plumes de Canard
La Douceur magique de tes Yeux a disparu, maintenant
Et depuis tu m’épies, Solitude…
J’ai gravi la Colline aux Herbes sauvages
Au Sommet des Vents hurlaient inlassablement nos deux Noms
J’y ai distingué ta Voix qui ondulait dans l’Alpage
Quand j’ai voulu m’en saisir elle s’est sauvée d’un Bond
Et depuis tu me guettes, Solitude…
J’ai allongé mon Corps sur un Tapis de Bruyère
Leurs Feuilles parfumées avaient conservé la Chaleur de ta Peau
J’ai hâte de sentir sur ton Épaule cette Odeur de Menthe claire
Mes Mains te cherchent parmi la Forêt des Lys d’Eau
Et depuis tu me tues, Solitude…
J’ai trouvé sur ma Route des Traces de toi
Mon Coeur s’est noyé sous tes Regards d’Eau douce
Et ta Voix tempête par-delà l’Arrête de mon Toit
Mes Mains t’ont trouvé assoupi au Pied des Souches
Et depuis tu t’enfuis, Solitude…
Mac’hvala, le 14 avril 2007
[Poème acrostiche]
Crépite en moi le Feu que tu as allumé
Hérisse ma Peau de cent Flammes d’Aurore
Aride comme le Désert que j’ai longtemps humé
Une Blessure déchire la Glace qui dort
Danse en moi des Étincelles de Magie inespérées.
Mac’hvala, 2007
Je suis partie en Solitaire sur les grands Chemins
Mon Corps blessé et nu sous mes Habits de Pèlerin
J’ai marché aussi loin, aussi vite que j’ai pu
Pour fuir une Vie dont je n’ai jamais voulu
Fuir, c’est tout…
Je me suis égarée dans une froide Impasse
J’ai hurlé pour que sous ma Voix les Murs cassent
J’ai longtemps erré à la Recherche d’une Issue
À la Fin, je me suis assise et j’ai pleuré, déçue
Seule, c’est tout…
J’ai tenté de te trouver parmi les Milliards d’Âmes
Je t’ai cherché dans l’Eau, dans le Feu, dans les Flammes
J’ai suivi tes Pas dans la Boue des Marais lointains
Ça ne m’a menée qu’à une Ville morte d’Éboulis éteints
Chercher, c’est tout…
J’ai trouvé ta Trace dans l’Ombre des Montagnes chenues
Ton Image se reflétait encore sur l’Eau que tu avais bu
J’ai senti ton Parfum de Menthe, de Souffre, de Velours
J’ai gravi les Rochers raides en Quête de ton Amour
Te trouver, c’est tout…
Au Sommet enfin, je t’ai vu pour la première Fois
Tu me tournais le Dos, ton Charisme noyait le Vallon froid
Lorsque tu m’as pris les Mains, quand nos Doigts se sont entremêlés
Le Ciel nous a inondés de Neige, les Flocons fondaient sur nos Peaux
Des Morceaux d’Éternité pour rendre nos Coeurs plus chauds
Des Phalènes de Joie pour sceller notre Union sacrée
Ensemble, c’est tout…
Mac’hvala, le 13 avril 2007
[Poème acrostiche]
Comment puis-je saisir ta Main qui se tend?
Il me faut une Échelle, t’atteindre à tout Prix
Et ces Nuages qui passent du Gris au Blanc
Les Robes des Anges les ont balayés et pris.
Mac’hvala, 2007
J’avais peur de me brûler les Ailes
Tu m’as montré la vraie Nature du Feu
En me faisant goûter la Flamme de tes Yeux
À présent le Feu et moi sommes parallèles
J’avais peur de me jetter à l’Eau
Tu m’as appris à nager comme toi
En me soutenant quand je menaçais de me noyer en toi
À présent je suis Fille des Mers et des Ruisseaux
J’avais peur d’aimer la Vie
Et tu m’as dit qu’elle pouvait être belle
Et m’emmenant marcher dans les Neiges immortelles
À présent je ne quite plus les Montagnes et ta Compagnie
J’avais peur que tu ne me quittes
Mais tu m’as promis d’un seul Regard
De rester là où tant d’autres s’égarent
Et sans Regret tu as lié à moi le Feu qui t’habite
Mac’hvala, le 3 avril 2007
[Poème acrostiche]
Comme à chaque Nuit, j’erre parmis les Pierres
Irréelles dans le Tissu des Heures brisées
Miroite sur les Croix de métal la Lumière
Échevelée de la Lune pâle, effilochée
Tes Doigts sortent de la Terre légère
Ils me supplient de les réchauffer
Entre mes Mains avec Amour je les serre
Rien, dès lors, de ce que tu as pu être ou faire n’
Est plus important que ta Vie ressuscitée.
Mac’hvala, 2007
Le Monde ne tourne plus rond
Depuis que les Étoiles sont tombées
Les Anges déchus les dévorent, affamés
Et se gavent de leur Miroitement blond
J’entends des Cris dans la Nuit déchaînée
D’une Âme torturée que l’on met à Mort
Les Bruits des Chaînes de l’Ironie du Sort
Et la Complainte des Enfants trépassés
Je me heurte au Mur ancestral
Des Peurs, je saigne d’un Sang glacial
Qui brûle la Peau de mes Lèvres écoeurées
Par l’Odeur du Sel, de la Chair calcinée
L’Ombre des Lendemains me poursuit
Comme un Fantôme elle me hante chaque Nuit
Elle passe à mon Cou le Satin noir du Deuil
Ses Mains de Phosphore grattent à mon Seuil
Elle me hume car elle me veut
Corps et Âme, toute entière dévouée à elle
Bientôt elle me trouvera devant Dieu
Demain je passerai la Barrière du Ciel.
Mach’vala, 2007
Dans mon Sommeil je t’appelle par mille Noms
Aucun ne semble te convenir, jamais tu ne réponds
Mais au moins ai-je croisé ta Silhouette
Au Détour d’un Chemin sous une Lune blette
Tu viens toujours avec la Neige, de tendres Flocons
Tu m’entraînes vers des Montagnes et de clairs Valons
Au-delà de nos Têtes un Ciel irrisé de Couleurs
Moins belles que tes Yeux aux vertes Lueurs
Lorsque le Rêve prend fin au Saut du Lit
Les draps ont gardé ta Forme dans leurs Plis
Mes Cheveux ondulent encore sous ta Respiration
Et mes Yeux ont volé à ton Regard sa Forêt de Néons
À chaque Fois que tombent les Flocons
Quand la Nature se renferme dans son blanc Cocon
Je sais que quelque part tu penses à moi
Et que le Soir, la Neige nous réunira.
Mac’hvala, 2007
[Poème acrostiche]
Chaque Pas dans ce Sanctuaire
Résonne de mille Échos
Illuminations de l’Hiver
Sans Paroles sans Mots
Tout se mêle dans ma Tête
À la Lueur de la Glace
Limpide et sans Requête
J’avais espéré que tu sois là
Ne vois-tu pas que la Neige est plus froide
Sur le Haut de Montagnes?
Ton Absence gèle toute Chose sur Terre
J’avais espéré que tu sois là
Ne sens-tu pas que la Mer qui me noie
Devient plus profonde de Jour en Jour?
Je perd Pied dans ce grand Vide d’Amour
J’avais espéré que tu sois là
Les Rayons du Soleil se font Glace sur ma Peau
À mes Cris de Désespoir se joignent des Nuées de Corbeaux
Que puis-je faire pour rendre mon Coeur moins las?
J’avais espéré que tu sois là
La Lune de Deuil se réchauffe peu à peu
Elle se glisse comme un mauvais Rêve sous mes Yeux
Je me réveille seule et en Éclats
J’espère encore que tu viendras
Je prie chaque Nuit sous un Ciel plombé
Je joins ma Plainte à celles des Loups égarés
Je t’attendrai à Genoux jusqu’à l’Heure du Trépas.
Mac’hvala, le 15 mai 2007